Saturday, October 5, 2013

La charte des valeurs québécoises : démocratie à la dérive



Je suis athée.

Personnellement, je considère qu'un monde meilleur débute le jour où tout le monde renoncerait aux religions: la superstition est une entrave au développement de la science, le dogme est un outil d'exclusion et qui génère nombre de violence. Un monde peuplé de libre penseurs serait mieux. J'aimerais que les gens soient de mon avis, mais d'un autre côté, obliger les gens à partager cet avis serait absurde et irait à l'encontre de l'essence même de la libre pensée. On ne peut pas protéger la démocratie en limitant la liberté d'expression. La charte des valeurs québécoises, dans une certaine mesure, rappelle le cas états-unien de l'amendement contre la désacralisation du drapeau américain, projet rejeté parce que le pouvoir coercitif octroyé au Congrès pour lutter contre l'endommagement du symbole va à l'encontre de la liberté (dont la liberté d'expression) que ce drapeau représente. Etre libre penseur, c'est en partie reconnaître aux gens le droit d'avoir tort quand, eux, ils choisissent d'adopter une religion. De toute manière, comme le relève Amin Maalouf dans ouvrage Les Identités meurtrières (livre incontournable pour toutes les questions relatives aux accomodements religieux que semble ne pas avoir lu Mathieu Bock-Côté), les dictatures dites laïques ont tendance à générer des extrémistes religieux parce que ces derniers carburent à la persécution et aux martyrs pour se sentir justifiés dans leur cause. Quand il est enterré, un germe prend racines.

Si Facebook et les médias sociaux nous ont habitué à bloquer les gens qui ont des opinions qui nous déplaisent, la vie en société ce n'est pas la même chose. On ne peut rendre invisibles les gens qu'on n'apprécie pas par la force de la loi. Si on n'aime pas côtoyer les gays, les musulmans ou (dans mon cas) les fans de Justin Bieber, on ne peut par l'arbitraire de la loi, par une quelconque charte, dicter que telle idée est bonne alors que l'autre est interdite d'affichage (bien que certaines idées peuvent, par contre, être ridiculisées). Sinon, ce qu'on appelle démocratie devient en réalité de l'ochlocratie, le pouvoir de la foule en colère. Et l'opinion de cette dernière est rarement éclairante, surtout quand il est question d'une problématique complexe comme celle des limites de la liberté de religion au sein de la liberté d'expression.


Voile et turban : le problème de la polysémie


Babushka ou Musulmane?
A priori, je suis d'avis que la religion n'a pas sa place dans les affaires de l'État si le gouvernement veut prétendre représenter tous ses citoyens sans favoriser parmi ceux-ci un groupe religieux particulier. Une charte de laïcité qui interdirait tous les symboles religieux peut paraître intéressante. Freedom from Religion before Freedom of Religion. Mais à bien penser, comment l'applique-t-on, cette charte? Prenons l'exemple du voile: d'un côté, il y a une musulmane pratiquante, qui par conviction porte le hidjab, et qui s'affiche donc avec un symbole jugé ostentatoire; de l'autre, il y a une grand-mère russe, portant elle aussi un foulard, simplement par tradition et donc n'est pas un symbole religieux ostentatoire. Les deux femmes ont acheté exactement la même pièce de tissu au même magasin. Elles le portent pour des raisons différentes. Dans ce cas-ci, ce n'est pas tant le foulard qui dérange, dira-t-on, mais le symbole qu'il représente. Le hidjab est souvent associé à l'extrémisme musulman. Or, un symbole, ça relève du monde de la pensée et c'est à se demander si le gouvernement ne veut créer pas une Police de la Pensée (Thought Police) au sein de sa fonction publique. Si on est libre penseur, qu'on souhaite défendre la démocratie, on ne peut commencer à encourager le gouvernement à gérer nos idées et à décider, arbitrairement, que tel voile est autorisé, alors que l'autre ne l'est pas. Le même problème surgit avec le turban: chez les Sikhs, c'est un symbole religieux, alors que pour Francine Grimaldi, ce n'est pas (oui, cet exemple est souvent repris). Si Monsieur Singh de l'Inde et Francine Grimaldi étaient tous deux employés du gouvernement provincial du Québec, le premier aurait à enlever sa coiffe qui constitue un signe ostentatoire, alors que l'autre pourrait la garder. On revient donc à une décision arbitraire, d'autoriser ou non un objet physique concret selon l'idée qu'il représente. C'est quoi la démocratie, sinon un débat d'idées, et comment peut-il y avoir débat si on se met à interdire certaines de ces idées?


Le virage à droite du Parti Québécois


Le Parti Québécois (PQ), qui est présentement au pouvoir, est un curieux amalgame de différents groupes souverainistes, de gauche et de droite, construit autour d'une idée principale: faire l'indépendance du Québec. Or, ce parti n'est plus réellement souverainiste. Certes, on me sortira l'excuse que le PQ forme un gouvernement minoritaire et ne peut pas se risquer d'entreprendre un referendum perdant de la question nationale, mais dans le concret, il n'y a rien qui est mis de l'avant pour promouvoir l'idée fondatrice de ce parti. Même l'idée d'une supposée «gouvernance souverainiste» est ridicule, dans la mesure n'importe quel gouvernement provincial, qu'il soit fédéraliste, cherchera à défendre auprès du gouvernement fédéral les domaines et les champs de compétences qui lui sont propres. Faire de la gouvernance souverainiste, c'est une façon molle d'être fédéraliste, une bien curieuse situation pour un parti qui se dit indépendantiste.

En plus de la question nationale, le Parti Québécois est souvent associé à la social-démocratie, supposément parce qu'il est «plus à gauche» que le parti affairiste des libéraux. Dans les faits, le PQ a été le parti de Lucien Bouchard, d'Éric Duhaime et de Maxime Bernier, tous des gens beaucoup plus proches de l'Institut économique de Montréal (IEDM), ce lobby de droite déguisé en think tank, que du CSN. Il aussi été le parti de François Legault, qui s'affiche maintenant ouvertement comme un pantin du patronat sous la bannière de la CAQ. Évidemment, le Parti Québécois a une aile progressiste, mais elle a été graduellement muselée, que ce soit par l'obsession du «déficit zéro» durant le règne de Lucien Bouchard ou par l'expulsion du SPQ Libre du PQ en 2010. Ni progressiste, ni indépendantiste, le PQ voit son leadership pour ces deux causes défié. Comme la nature a horreur du vide, et que ces causes trouvent toujours appui chez une partie de la population, on a vu naître au Québec deux nouveaux servant à jouer le rôle que les péquistes devaient remplir: Option Nationale, pour promouvoir la souveraineté, et Québec Solidaire, pour défendre les intérêts progressistes. Plutôt que de se remettre en question, le Parti Québécois a été rapide sur la gachette en prétendant que ces deux partis «divisait le vote souverainiste», comme si le PQ avait le monopole de la cause indépendantiste. Curieux silence de la part des péquistes quasiment une année quant à la présence d'un autre parti, la Coalition Avenir Québec de l'ancien péquiste François Legault, qui a grugé au Parti Québécois presque 10 fois de sièges aux élections de 2012 que ce que Option Nationale et Québec Solidaire ont pu rassembler ensemble.

Ayant tenté de jouer la «carte progressiste» pour rallier la gauche contre le gouvernement Charest aux dernières élections, le Parti Québécois s'est retrouvé minoritaire, et ce malgré l'impopularité du gouvernement précédent, rongé par les scandales et par ses dérives autoritaires. En un an, le gouvernement Marois a fait volte-face sur nombre de ses promesses, notamment la taxe santé qui déplaisait à l'Establishment financier (qui supposément souffre «d'angoisse fiscale»... non, mais pleurez-moi une rivière!). Révisant ses stratégies, et reconnaissant finalement que la CAQ est le principal obstacle à l'obtention d'un gouvernement majoritaire, le PQ a décidé de courtiser l'électorat de droite. Quelle droite? En voulant récupérer l'électorat de l'ADQ, dont plusieurs électeurs se considèrent orphelins malgré que le défunt parti ait essentiellement rejoint la CAQ, le Parti Québécois a décidé de réouvrir le débat sur les accommodements religieux (pour être clair, un accommodement raisonnable, c'est une rampe d'accès pour une personne en fauteil roulant, alors qu'un accommodement religieux, c'est d'offrir un menu halal dans un restaurant) afin de mobiliser ceux que je qualifie de «nationaleux» : ils sont assez nationalistes pour vouloir défendre ce qu'ils considèrent être la culture du Québec, mais pas réellement assez motivé pour régler le problème une fois pour toute en faisant l'indépendance nationale. Parmi les rangs des nationaleux, on retrouve aussi un lot d'islamophobes, pour qui le projet de la charte des valeurs est un bon moyen d'évincer les musulmans de la sphère publique, et des catholiques à qui on promet de ne pas enlever le crucifix (concernant le maintien du crucifix à l'Assemblée nationale, le texte de Sébastien Croteau, La dernière tentation de Bernard Drainville - Pour en finir avec le crucifix, jette un regard éclairant sur la situation). Sous le couvert de la laïcité de l'État et celui de l'égalité homme-femme (ce qui est redondant vu que ce principe est déjà appuyé par la Charte des droits et des libertés des personnes), le Parti Québécois tente de manière furtive d'imposer le catholicisme comme religion pour plaire aux quelques bérets blancs que ça pourrait intéresser.





[texte à compléter]




Sur la piste de l'Oregon



- Il ne faut pas juger les livres un par un. Je veux dire : il ne faut pas les voir comme des choses indépendantes. Un livre n'est complet en lui-même ; si on veut le comprendre, il faut le mettre en rapport avec d'autres livres du même auteur, mais aussi avec des livres écrits par d'autres personnes. Ce que l'on croit être un livre n'est la plupart du temps qu'une partie d'un autre livre plus vaste auquel plusieurs ont collaboré sans le savoir. C'est tout ce que je voulais dire au sujet des livres et maintenant je vais essayer de dormir. Bonne nuit.

Jacques Poulin, Volkswagen Blues, p.186



Le nez enfoui dans les bouquins, je cumule les lectures, les bouquins s'empilent. Sans être en études littéraires (un progamme qui de toute façon mène « nul part », comme l'atteste Gilles Taillon, dont la plus haute qualification est un baccalauréat en littérature - un bien curieux choix pour celui qui allait être président du Conseil du patronat de 1998 à 2006 en plus d'avoir été brièvement le chef du parti affairiste qu'est l'ADQ - on voit que « ça sert rien » et que ça « ne correspond pas aux besoins du marché »), je retrouve un certain confort dans les livres. Après tout, un livre n'a pas besoin de recharger ses piles, il est souvent peu dispendieux à remplacer en cas de vol, il se fout éperdumment du signal wi-fi... et est beaucoup plus sécuritaire à manier dans la baignoire qu'un laptop! Dans le lot des lectures a surgit récemment une suggestion de ma «mégère apprivoisée» : Volkswagen Blues de Jacques Poulin. La panthère a été persistante. «Lit-le», dit-elle. Je me suis obstiné à ne pas le lire. Après tout, j'avais lu, il y a peut-être dix ans de cela, Le vieux chagrin du même auteur (ouvrage obligatoire dans un cours de tronc commun au cégep) et je l'avais trouvé ennuyeux avec l'anticlimax dont je ne souhaite pas dire davantage. J'étais repoussé par l'idée de refaire le même genre d'expérience, et je suis passé à d'autres ouvrages avant de céder à la proposition de la féline bibliothécaire.

Ce fut une agréable surprise, bien que je ne remettrais pas un prix Goncourt à Jacques Poulin, et je me suis rappeler de mes propres voyages dans l'Ouest canadien, revoyant dans mon imaginaire les Prairies et les Rocheuses, bien que les protagonistes du livre faisait le trajet en sens inverse. Les références historiques sont d'un grand intérêt, permettant de rappeler qu'avant que le Québec ne soit qu'une enclave francophone dans une mer anglophone, il y avait eu une Amérique du nord parcourue par les Français, une Nouvelle-France bâtie sur le voyage et sur les alliances entre Autochtones et Francophones. Ces références ne sont pas confinés à un espace statique et poussiéreux puisque Jacques Poulin, à travers le récit et les péripéties de Jack et de la Grande Sauterelle, redonne vit à l'Histoire dans un contexte contemporain.

Je m'imaginais aussi ma tendre moitié se projeter dans le personnage un peu bohême, voyageuse et amante des livres qu'est Pitsémine, une bien bizarre sorte d'«Inception», où en tant que lecteur je voulais deviner comment une autre aurait pu interpréter les mêmes passages. Je me demande aussi si la quête du personnage principal, celle de retrouver son frère Théo, ne cache pas un second sens (dans la mesure où Théo est le mot grec pour Dieu, ce qui ne serait pas étranger  à l'aspect «spirituel» du voyage, bien que le parcours semble dans l'ouvrage plus important que la destination). Et puis la présence du petit chat noir Chop Suey, qui me rappelle mon propre chat Félicité (qui me manque beaucoup).


«Tu vas aimer ça » disait-elle.

Elle avait raison.

(Voilà, c'est écrit, alors on ne pourra me plus me reprocher de vouloir avoir toujours raison... même si la plupart du temps mon avis est le plus pertinent ;P )


Je vais terminer American Gods de Neil Gaiman, et après je jeterai un coup d'oeil sur La tournée d'automne de Jacques Poulin.


Des fois, c'est plaisant d'avoir tort. :)

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Image (domaine public) :

http://en.wikipedia.org/wiki/File:1973-1980_Volkswagen_Kombi_%28T2%29_van_01.jpg



Saturday, September 14, 2013

« Tout va très bien! »




Un petit extrait de Fahrenheit 451 que j'ai trouvé intéressant:


Heureusement, les toqués dans son genre sont rares. A présent, on sait comment les étouffer dans l'oeuf. On ne peut pas construire une maison sans clous ni bois. Si vous ne voulez pas que la maison soit construite, cachez les clous et le bois. Si vous ne voulez pas qu'un homme se rende malheureux avec la politique, n'aller pas lui casser la tête en lui proposant deux points de vues sur une question: proposez-lui-en un seul. Mieux encore, ne lui en proposez aucun. Qu'il oublie jusqu'à l'existence de la guerre. Si le gouvernement est inefficace, pesant, gourmand en matière d'impôt, cela vaut mieux que d'embêter les gens avec ça. La paix, Montag. Proposez des concours où l'on gagne en se souvenant des paroles de quelque chanson populaire, du nom de la capitale de tel ou tel État ou de la quantité de maïs récoltée dans l'Iowa l'année précédente. Bourrez les gens de données incombustibles, gorgez les de "faits" qu'ils se sentent gavés, mais absoluments "brillants" côté information. Ils auront alors l'impression de penser, ils auront le sentiment du mouvement tout en faisant du sur-place. Et ils seront heureux parce que de tels faits ne changent pas. Ne les engagez pas sur des terrains glissants comme la philosophie ou la sociologie pour relier les choses entre elles. C'est la porte ouverte à la mélancolie. Tout homme capable de démonter un télécran mural et de le remonter, et la plupart en sont aujourd'hui capables, est plus heureux que celui qui essaie de jouer de la règle à calcul, de mesurer, de mettre l'univers en équations. ce qui ne peut se faire sans que l'homme se sente solitaire et ravalé au rang de la bête. Je le sais, j'ai essayé. Au diable, tout ça. Alors place aux clubs et aux soirées entre amis, aux acrobates et aux prestidigitateurs, aux casses-cous, jet cars, motogyres, au sexe et à l'héroïne, à tout ce qui ne suppose que des réflexes automatiques. Si la pièce est mauvaise, si le film ne raconte rien, si la représentation est dépourvue d'intérêt, collez-moi une dose massive de thérémine. Je me croirai sensible au spectacle alors qu'il ne s'agira que d'une réaction tactile aux vibrations. Mais je m'en fiche. Tout ce que je réclame, c'est de la distraction. »



Ray Bradbury, Fahrenheit 451, 1953, p.90-91



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Tuesday, June 4, 2013

Soupe au poulet et recherche fondamentale

Depuis 2013, la recherche appliquée a davantage la cote que la recherche fondamentale auprès du gouvernement conservateur. Dans cette époque où triomphe la nouvelle religion qu'est l'économie et les profits à tout prix, la science est récupérée à des fins politiques et financières. Elle perd dans le processus  l'indépendance d'enquête des chercheurs tout en se voyant soumise à un biais de confirmation de profitabilité qui nuit à un des principes premiers de la science qu'est l'objectivité du scientifique. De plus, cette recherche de profitabilité immédiate

Pour être clair, on définit la recherche appliquée comme celle ayant le but de résoudre de problèmes spécifiques dans un cadre pratique, alors que la recherche fondamentale n'a pas d'objectif initial prédéterminé, visant surtout les développements de connaissances générales sur le sujet étudié. Pour cette dernière, on peut donner l'exemple des recherches sur le laser, une découverte qui a ses débuts n'étaient qu'une curiosité de laboratoire, un sujet de bouquin de science-fiction, voire "une solution en quête de problème" selon les médisances de certains; pourtant, aujourd'hui, le laser a des applications concrètes dans une panoplie de domaines, que ce soit le divertissement (lecteur dvd), l'esthétique (épilation), le commerce (scan laser des caisses), la médicine (chirurgie au laser) ou l'arpentage. On pourrait difficilement imaginer notre quotidien sans l'apport du laser. Si on avait obéit à une logique de "next quarter profit", cette trouvaille aurait probablement été tablettée et les bénéfices subséquents, mêmes les moindres comme le fait qu'on n'a pas besoin de rembobiner un dvd après usage, auraient été perdus. 

Le problème du recul de la recherche fondamentale au Canada est que le gouvernement conservateur assume faussement que tous les progrès scientifiques sont obtenus de manière linéaire par des gains successifs (incremental) lié à l'étude d'un problème spécifique prédéterminé, alors que parfois que parfois des gains spectaculaires peuvent surgir subitement (landmark), parfois même par accident (e.g.: la pénicilline). Ces découvertes spectaculaires, imprévisibles, occasionnent par moment d'immenses remises en question qui ont un impact bouleversant l'ensemble de la société en remettant en question des concepts établis, comme ce fut le cas avec les travaux de Darwin (théorie de l'évolution), de Copernic (héliocentrisme) ou ceux de Galilée (rotation de la Terre). Cette effervescence scientifique contraste avec la stabilité désirée par certains groupes religieux, dont les croyances n'ont pas changé depuis l'Age du bronze, et le parti conservateur du Canada n'est pas étranger à un certain dogmatisme, voire intégrisme, que ce soit la présence de députés dissidents voulant ramener le débat sur l'avortement, ou la présence d'un ministre d'État des Sciences et Technologie, Gary Goodyear, ayant des affinités avec les créationnistes.

Un autre problème est le faux débat généré par le gouvernement Harper en créant artificiellement une opposition entre la recherche fondamentale et la recherche appliquée, quand différents bénéfices peuvent être obtenus de manière simultanée par ces deux formes d'enquêtes pour un même problème - par exemple, l'avion peut être amélioré de manière successive en modifiant le fuselage pour réduire peu à peu la résistance de l'air sur sa surface (recherche appliquée) et peut aussi connaître un progrès spectaculaire lorsque, par exemple, quand le moteur à réaction du jet vient remplacer l'antique hélice du biplan.



[texte à compléter]



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Image (domaine public):

http://en.wikipedia.org/wiki/File:Chicken_Noodle_Soup.jpg

Friday, January 25, 2013

Idle No More et le Forum social des peuples: mettre de l'énergie à la mauvaise place ?


Récemment (1), les organisateurs du mouvement Idle No More du Québec se sont rattachés au lancement du Forum Social Québec - Canada - Peuples autochtones. Le nom a au moins le mérite d'être en français - et j'ai critiqué sévérement le mouvement Idle No More pour sa négligence envers le fait français au Québec (et remarquez que le slogan n'est toujours pas traduit après plus d'un mois, mais ça importe peu maintenant vu que le momentum est perdu, que le hockey dominera le contenu des médias prochainement).

Il reste toutefois que la mission première du groupe, déstabiliser le gouvernement Harper par une variété de moyens de pression, oublie une chose: les projets de lois sont votés à la Chambre des communes, par des députés suivant la ligne de parti d'un gouvernement conservateur majoritaire. Je suis pour la vertu et la dénonciation du gouvernement Harper, mais il reste que dans un contexte purement québécois, le principal moyen de faire pression sur Stephen Harper, c'est d'empêcher qu'il obtienne des sièges au Québec. Or, la mission est largement accomplie: les Québécois ont voté pour le Bloc Québécois durant la période où portant les médias nous parlaient d'un vent conservateur émanant de la Ville de Québec, et lors des élections suivantes, pour contrer les Conservateurs et par sympathie à l'égard de Jack Layton, les Québécois ont suivi massivement la vague orange dans une tentative vaine de tendre la main aux progressistes du Canada anglais. Quand bien même que les militants autochtones du Québec fassent tous les efforts nécessaires pour empêcher que Stephen Harper obtienne des votes, il reste que la bataille comme telle pour le contrôle du gouvernement fédéral se passe à l'extérieur de notre province. Continuons à dénoncer le virage à droite, oui, mais n'en faisons pas le principal enjeu.

Il y a par contre au Québec un gouvernement que les Autochtones peuvent déstabiliser: le gouvernement provincial, minoritaire, dirigé par Pauline Marois. Ce gouvernement est vulnérable aux pressions et le Parti québécois, devenu essentiellement une machine électoraliste sans projet de société, peut être sensible à certains enjeux, ne serait-ce pour garantir sa propre survie. L'un de ses enjeux, qui touche directement les Autochtones, c'est le Plan Nord (qu'on appelle maintenant "Le Nord pour tous", comme si dire gonorrhée à la place de chaude-pisse changeait réellement quelque chose) que le gouvernement Marois cherche toujours à imposer aux Autochtones. Bref, je pense que l'approche pancanadienne contre Harper devrait être placée au second rang face à des enjeux nationaux ici même au Québec.

D'autre part, je crois qu'il faut un sérieux renouvèlement du discours des militants autochtones. Les Autochtones peuvent revendiquer des droits, s'opposer à des projets (j'appuie à 110% la protection de la forêt de Poigan), mais il faut aussi par moments qu'ils offrent quelque chose, comme un projet rassembleur, et focaliser l'attention sur cette offre. Par exemple, les Inuit du Grand Nord ne font pas seulement de s'opposer aux projets de développement du Québec, mais, grâce à une concertation au sein de la Société Makivik, ils offrent un plan de développement économique, le Plan Nunavik. Ayant leur propre plan, les Inuit peuvent négocier avec le gouvernement provincial, de manière à ce que les deux plans s'harmonisent et aboutissent à un enrichissement mutuellement bénéfique, tout en tenant compte des sensibilités locales, comme les questions sociales et environnementales. A quand un Plan Nitassinan chez les Innus?

Bref, en trois points:

1. C'est bien de s'opposer à Stephen Harper, mais concrètement il ne faut focaliser trop là-dessus parce que le Québec ne votent déjà pas pour le parti conservateur.

2. Le gouvernement provincial du Québec est plus vulnérable aux critiques et il devrait être ciblé davantage.

3. Le discours autochtone doit être renouvelé de manière à ce que les revendications s'accompagnent aussi d'une offre, d'une alternative claire, compréhensible et bénéfique pour l'ensemble.



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(1) Autochtones et non-autochtones fondent un Forum des peuples contre Harper - Les initiatrices d'Idle No More vont à la rencontre des mouvements sociaux:
http://www.newswire.ca/fr/story/1104047/autochtones-et-non-autochtones-fondent-un-forum-des-peuples-contre-harper-les-initiatrices-d-idle-no-more-vont-a-la-rencontre-des-mouvements-sociaux

(2) Plan Nunavik
http://www.makivik.org/fr/building-nunavik/le-plan-nunavik/

La fin d'Idle No More: Repli stratégique, Réflexion, Re-déploiement





Avec Theresa Spence qui met fin à sa grève de la faim, c'est le temps de mettre un terme à la campagne Idle No More et passer à autre chose. Le momentum est terminé. Par contre, il reste de nombreuses causes autochtones à défendre, il faut rester pro-autochtone, mais un repli stratégique s'impose, ce qui ne veut pas dire l'abandon, une réflexion quant aux moyens et aux objectifs doit être fait, dans le but de redéployer les militants quand un réel plan sera mis de l'avant.

Le mouvement Idle No More a raté sa cible de plusieurs manières. D'abord les organisateurs québécois étaient en mode réactif plutôt que proactif: on voulait suivre la vague, participer au grand hashtag (dièse) idlenomore, et occuper une tribune. On n'a pas constaté que twitter, c'était un outil de diffusion, pas un objectif en lui-même. On a enfreint la première règle de toute campagne de publicité massive au Québec, comme établie par le grand publiciste Jacques Bouchard, qu'une publicité québécoise doit être conçue et exprimer en français pour rejoindre les gens d'ici; à la place, le mouvement s'est contenté de prêcher à des gens déjà convertis. Le mouvement a voulu agir rapidement, un peu comme un joueur de soccer, étourdi par un ballon qui le frappe à la tête, le prend et courre de toutes ses forces vers son propre but avec 110% d'énergie: personne ne doutera de la motivation sincère du joueur, mais autant d'énergie qu'il puisse mettre, il reste qu'il ne fixe pas le bon objectif.

Sans objectif clair et compréhensible, le mouvement n'arrive pas à focaliser les efforts, et il n'y a pas que moi qui le dit: Stuard Miyow, du conseil traditionnel mohawk, déplorait la confusion dans les messages, même si, comme moi, il est pro-autochtone. Si pour les carrés rouges, l'opposition à la hausse des frais de scolarité était claire, pour le mouvement idle no more, il était très difficile de discerné une revendication claire. Theresa Spence? Les traités?

Un autre problème est l'absence de renouvèlement du discours autochtone. Je crois que les Autochtones doivent passer du stade "on revendique des choses" à "on peut contribuer de manière significative au développement du Québec". Il faut passer des éternelles demandes à celle de l'offre. Il ne fait aucun doutes que les cultures des 11 nations ont beaucoup à offrir au Québec. Après tout, sans Autochtones, le Québec n'aurait pas son propre nom.

Monday, January 14, 2013

Plumes rouges et questions autochtones


Dans le contexte de la contestation actuelle du gouvernement Harper par les Autochtones et leurs sympathisants et de la complexité du dosssier en question, il est parfois difficile de pouvoir bien discerner les enjeux en question. Que représente réellement le mouvement « Idle No More » (que je traduis librement par « Fini de se faire plumer », question de conserver le contenu plutôt que le contenant et de mettre un terme  à cette anglicisation forcée à laquelle les organisateurs font sourde oreille)? Est-ce un mouvement issu de la base, comme le présente les différents portes-paroles et les médias conventionnels, ou est-ce un groupe téléguidé par les élites du Media Party, comme le dit Ezra Levant entre deux doses de LSD?


Qui sont les Indiens ?


« Mais qu'est-ce qu'ils veulent, eux, les Indiens ? »


Dans un premier, lorsqu'on aborde la question des Autochtones, il faudrait d'abord simplifier et en parler dans un contexte strictement québécois, sinon on se perd dans le capharnaüm canadien. Au Québec et dans la plupart des provinces canadiennes et ses territoires, il existe trois catégories de peuples autochtones:

  • Les Amérindiens comme tels, ceux qu'on appelle les Indiens d'Amériques ou Premières Nations
  • Les Inuit (singulier: Inuk)
  • Les Métis

Les peuples amérindiens et les Inuit forment des groupes culturellement, ethniquement et géographiquement bien différents. Par exemple, les Inuit vivent sur trois continents: Europe (Groënland), Amérique du Nord (Alaska et Grand Nord canadien) et Asie (la Béringie dans l'extrême-orient russe), alors que les Amérindiens sont retrouvés en quantité significative seulement en Amérique du nord. Génétiquement, les Inuit sont distincts, car leurs ancêtres proviennent de vagues d'immigration provenant beaucoup plus tardives (la remontant à l'an 1000 de notre ère) que celle des premiers Amérindiens (qui sont arrivés dans le Nouveau-Monde il y a au moins 30 000 ans, possiblement avant même que les premiers hommes de Cro-Magnon arrivèrent en Europe à partir de l'Afrique et du Moyen Orient pour prendre la place des hommes de Neanderthals). Bref, on peut dire qu'il y a des Autochtones en Amérique depuis aussi longtemps, peut-être davantage, qu'il y a des Européens en Europe. Et ce, qu'en déplaisent aux fabulations de Réjean Morissette. Au Québec, la plus ancienne présence humaine retrouvée jusqu'à maintenant date d'il y a au moins 10 000 ans, comme l'atteste les découvertes au site archéologiques du Lac Mégantic. À titre comparatif, les premières villes comme Çatalhöyuk et Jericho n'existaient pas encore au Moyen Orient, et la France terminait de subir les effets de la dernière ère glaciaire. On connaît peu sur les Autochtones de ces périodes outre que les artéfacts retrouvés, de leurs filiations avec les groupes culturels actuels. Mais on pourrait aussi dire la même chose des liens entre les Français actuels et les prédecesseurs Cro-Magnons.


Légalement au Canada, les Autochtones (Premières Nations, Métis et Inuits) sont gérés par la Loi sur les Indiens, une vieille loi raciste basé sur des pourcentages de sang et de la médecine eugéniste. Certains ont un statut reconnu et sont inscrits auprès du gouvernement fédéral. Une situation un peu ridicule, dans le fond, parce qu'on le code d'appartenance d'un peuple amérindien appartient à un autre peuple issu de la colonisation européenne. Imaginez, un instant, qu'un Français ait à demander au gouvernement turc le droit d'être reconnu légalement comme un Français. D'autres Autochtones ne sont pas inscrits auprès du gouvernement. Des trois catégories d'«Indiens», on se trouve donc avec un total de six groupes, si on réparti les membres aussi entre inscrits et non-inscrits. Voilà qui complexifie le dossier.


Au Québec, les nations amérindiennes sont au nombre de 10 (à celles-ci se rajoute les Inuit, le tout formant les 11 Premières Nations); le Canada et les États-Unis en comptent plusieurs centaines. Ces 11 populations retrouvées au Québec sont les Abénakis, les Malécites, les Innus (Montagnais), les Wendats (Hurons), les Mohawks, les Naskapis, les Cris, les Anishnabe (Algonquins), les Micmacs, les Attikamekws et les Inuits. Ces 11 nations forment des groupes culturels distincts. La langue innue est aussi différente de celle de Mohawks que le français du chinois. Certaines langues sont apparentées, au même titre que le français, l'espagnol et l'italien sont des langues latines, que l'allemand, le néerlandais et l'anglais sont des langues germaniques; trois groupes de langues autochtones existent au Québec: les langues algonquiennes (Algonquins, Innus, Naskapis, Cris, etc.), les langues iroquoïennes (Wendat, Mohawk), et langue inuite. Personne ne parle «l'indien».  


Si on combine les variations de statuts légaux (inscrits ou non), on peut obtenir 22 catégories. Si on rajoute les différences liés aux mariages mixtes (Métis), le nombre augmente encore. Ces divisions, créées par le gouvernement colonial canadien, servent à créer des inégalités et semer la discorde au sein des communautés des Premières Nations.





[texte à compléter]